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Credit Suisse et les banques européennes : quels impacts de marchés ?
information fournie par TRIBUNE LIBRE 27/03/2023 à 16:42

Credit Suisse (crédit photo : Adobe Stock /  )

Credit Suisse (crédit photo : Adobe Stock / )

Par François Rimeu, stratégiste senior chez La Française AM


Le stress actuel du secteur bancaire, visible aussi bien aux États-Unis qu'en Europe fait resurgir le spectre des crises financières passées et en particulier celle de 2008. Pour de multiples raisons, les situations sont pourtant bien différentes aujourd'hui, avec des banques beaucoup mieux capitalisées et dont les activités les plus à risque ont quasiment disparu de leur bilan. Nous avons publié une note à ce sujet, détaillant les raisons des faillites des banques régionales américaines et de Credit Suisse (même si pour cette dernière, ce n'est pas officiellement une faillite) et le caractère spécifique de ces événements de crédit.

Si les déboires de ces banques ne sont donc pas directement liés aux hausses de taux orchestrées par les banques centrales depuis plusieurs mois, ces établissements sont pourtant les premières victimes du très fort durcissement des conditions de crédit auxquels nous assistons.

La sévérité accrue en matière de crédit est illustrée ci-dessous par l'enquête en provenance de la Fed (Senior Loan Officer Survey) et montre la très forte corrélation entre cet indicateur et la probabilité d'une récession aux États-Unis.
Le constat est par ailleurs identique en Europe et l'enquête faite par la BCE (Bank Lending Survey) montre des résultats similaires sur les sociétés européennes, en particulier sur le secteur immobilier.

Il est extrêmement difficile de savoir quelles seront les conséquences exactes de ces faillites sur la croissance économique, d'autant plus que la situation reste très confuse quant au devenir d'un certain nombre de banques régionales américaines qui ont vu le cours de leurs actions s'effondrer ces derniers jours.  Nous estimons que ces turbulences vont probablement accélérer le

durcissement des conditions de crédit, car les banques chercheront avant tout à afficher des bilans solides, même si cela se fait au détriment de leur volume de prêts. Par ailleurs, la Fed et la BCE ont signalé lors de leurs dernières réunions que ces évènements participaient à durcir les conditions financières et que cela pourrait influencer leur décision de ne pas augmenter les taux d'intérêt autant qu'ils l'avaient prévu auparavant.

Il n'en reste pas moins que les conditions financières sont aujourd'hui restrictives, aussi bien aux États-Unis qu'en Europe (voir graphique en pièce jointe), et que plus le temps avance, plus la probabilité augmente que nous ayons des évènements de crédit similaires à ce que nous venons de vivre. Les premières « victimes » ont été les maillons les plus faibles de l'écosystème financier, mais si l'on se base sur les cycles de durcissement passés, d'autres vont suivre et ils ne feront pas nécessairement partie du monde bancaire.

Les principaux « suspects » nous semblent être les industries ayant profité de taux extrêmement bas pendant des années, moyennement régulées, et dont les actifs sont peu liquides et / ou valorisés de manière artisanale (Privateequity / Privatelending / Shadow banking).

Les banques centrales ont admis dernièrement que leur action commençait à avoir des conséquences sur les acteurs les plus faibles mais cela n'est toutefois pas de nature à les faire changer d'optique de manière radicale. Si la situation n'empire pas et qu'elles arrivent à circonscrire les problèmes actuels, alors l'impact sur la croissance et l'inflation ne devrait pas être suffisant pour qu'elles arrêtent leur cycle de durcissement.

En effet, les derniers chiffres d'inflation ont globalement surpris à la hausse dans la plupart des économies développées. Cela a été le cas aux États-Unis, en zone Euro ou encore au Royaume-Uni. Cela ne change pas notre opinion à moyen terme d'un risque inflationniste diminuant graduellement, ce que corrobore d'ailleurs l'ensemble des enquêtes sur les anticipations d'inflation (Enquête BCE, Michigan ou encore Fed de New York), mais ce n'est pas de nature à rassurer les banquiers centraux à cour terme. De la même façon, le marché de l'emploi continue de montrer une très forte résilience avec des taux de chômage toujours très faibles, ce qui là encore ne poussera pas les banques centrales à modifier leurs politiques toutes choses égales par ailleurs.

Si on peut débattre de l'impact économique de cette crise bancaire on peut en revanche penser de manière assez certaine que l'impact sur les bénéfices des banques est négatif avec des revenus d'intérêt qui devraient diminuer. De la même façon, la baisse continue des prix des matières premières devrait elle aussi jouer négativement sur les bénéfices des entreprises et en particulier celle du secteur énergétique. Dans le même temps nous assistons depuis plusieurs mois à des annonces de bénéfices et de chiffres d'affaires plutôt décevants dans le secteur technologique américain, en particulier pour les plus grosses capitalisations. Quand on sait que les rachats d'action proviennent aux États-Unis à 50% des secteurs de l'énergie, des banques et des cinq plus grosses sociétés technologiques, il est probable que l'un des soutiens majeurs des indices (surtout aux États-Unis) s'estompe dans les mois qui viennent.

Conclusion

La situation nous semble donc aujourd'hui dangereuse et incite à la prudence. La crise bancaire que nous traversons est un évènement de crédit important, mais il n'est pas, à priori, de nature à modifier suffisamment les prévisions d'inflation et de croissance pour que les banques centrales arrêtent leur cycle de hausses des taux. De la même façon, ce qu'il s'était passé en octobre dernier sur les fonds de pension au Royaume-Uni n'avait pas eu de conséquences fortes. Elles sont vigilantes, elles mettent les outils en place pour éteindre l'incendie, mais elles ne vont pas non plus s'arrêter.

Le problème est que plus le temps passe, plus la probabilité d'événements similaires augmente, et la volatilité peut ressurgir de manière brutale et imprévisible. A ce sujet, il est d'ailleurs assez rare d'assister à une hausse massive de la volatilité implicite des marchés de taux sans que cela ait d'impact significatif sur la volatilité des autres classes d'actifs ou sur les primes de risque de manière générale. C'est pourtant ce à quoi nous avons assisté au cours des deux dernières semaines et il n'est pas du tout certain que cela se passe de la même façon la prochaine fois.

Notre positionnement

Duration
•    Nous maintenons notre vision positive sur les taux nominaux et les taux réels (surtout sur les États-Unis) avec une préférence pour les taux réels en raison d'une asymétrie que nous jugeons très positive.
•    Les points morts d'inflation nous semblent eux avoir trop corrigé dans cette période de stress (-80bps pour les points morts d'inflation à 2Y aux États-Unis) au regard du risque inflationniste qui pèse encore sur le marché.

Crédit
•    Dettes surbordonnées : prudence sur le segment de marché des LT2, en particulier les call courts, avec un marché qui n'intègre que très peu de risque de non remboursement pour 2023. Beaucoup de non-call à attendre sur les AT1 (comme Deutsche Bank dernièrement) mais les cours reflètent déjà ce risque.
•    Investment grade : les dettes bancaires n'ont quasiment jamais été aussi décotées que leurs homologues non bancaires; nous sommes positif à moyen terme en zone Euro mais plus prudent aux États-Unis. Le reste du marché n'a été que peu décoté mais profite de sa forte duration sans ces périodes de stress.
•    High Yield : les risque spécifiques vont continuer à émerger, ainsi que les taux de défaut, avec des valorisations qui ne reflètent pas encore de risques très importants. Même si les fondamentaux des sociétés restent solides, nous diminuons nos allocations, en particulier sur le segment B.

Actions
•    Nous maintenons des expositions faibles de manière générale.
•    Augmentation de nos pondérations sur les services publicsau détriment des valeurs énergétiques et financières (et ce malgré des exposition déjà faibles sur le secteur financier).
•    Maintien de notre préférence pour la zone Asie / Chine vs Europe / États-Unis.


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Source : La Française Asset Management. Les informations contenues dans ce document ne sauraient constituer un conseil en investissement, une proposition d'investissement ou une incitation quelconque à opérer sur les marchés financiers. Les appréciations formulées reflètent l'opinion de leurs auteurs à la date de publication et ne constituent pas un engagement contractuel du Groupe La Française. Ces appréciations sont susceptibles d'évoluer sans préavis dans les limites du prospectus qui seul fait foi. Le Groupe La Française ne saurait être tenu responsable, de quelque façon que ce soit, de tout dommage direct ou indirect résultant de l'usage de la présente publication ou des informations qu'elle contient. La présente publication ne peut être reproduite, totalement ou partiellement, diffusée ou distribuée à des tiers, sans l'autorisation écrite préalable du Groupe La Française.

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